Garantie décennale : quel rapport avec les acteurs de la construction ?
Comprendre et appliquer

Mise à jour au 4 avril 2024 suite à la publication du CCTB 01.11.

Dans la pratique du secteur de la construction, les auteurs de projet sont bien souvent confrontés à la responsabilité en garantie décennale, obligation juridique dont ils sont redevables envers leur maître d’ouvrage. En effet, l’assurance décennale doit être souscrite par divers professionnels du bâti.

Quoi ?

Comme son nom l’indique, cette garantie protège le maître d’ouvrage pendant une durée de dix ans contre un certain nombre de vices de construction qui pourraient être décelés dans le bâtiment concerné, à partir de la réception définitive/agréation des travaux. Il est considéré que la garantie décennale intervient dès lors qu’un travail immobilier est réalisé, qu’il s’agisse d’une construction ou de travaux de rénovation.
Cette thématique est, en règle générale, couverte par la loi du 31 mai 2017, dite « Loi Peeters » relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile décennale des entrepreneurs, architectes et autres prestataires du secteur de la construction de travaux immobiliers.

Qui ?

L’auteur de projet, l’entrepreneur ou un autre prestataire du secteur pouvant voir sa responsabilité civile décennale engagée en raison des actes qu’il accomplit sur des habitations situées en Belgique, à titre professionnel, doit être couvert par une assurance en responsabilité décennale. Afin de définir et délimiter les professionnels étant soumis à cette obligation, ladite loi Peeters, en son article 2, définit les prestataires concernés par cette obligation légale. 

Premièrement, relatif aux auteurs de projet débiteurs d’une telle obligation, il est fait référence à la définition légale proposée par l’article 2 de la loi du 20 février 1939 sur la protection du titre et de la profession d’architecte. 

Ensuite, quant à l’entrepreneur responsable de l’exécution du chantier, ce dernier devra être couvert par l’assurance en garantie décennale lorsqu’il s’engage à exécuter pour le compte d’autrui, moyennant rémunération directe ou indirecte, en toute indépendance mais sans pouvoir de représentation, un travail immobilier donné pour lequel l’intervention de l’architecte est obligatoire.

Mais quand l’intervention de l’architecte est-elle obligatoire ?

En vertu de l’article 4 de la loi de 1939, les pouvoirs publics, mais également les particuliers dans le secteur de la construction sont soumis à l’obligation de recours à l’architecte pour l’établissement des plans et le contrôle de l’exécution des travaux pour lesquels les lois, arrêtés et règlements imposent une demande préalable d’autorisation de bâtir.

Enfin, la loi impose également à certains autres prestataires du secteur de la construction d’être couvert par une assurance en garantie décennale. L’article 2 de la loi de 2017 définit ces prestataires comme toute personne physique ou morale (autre que le promoteur immobilier) qui s’engage à effectuer, pour le compte d’autrui (…) des prestations immatérielles relatives à un travail immobilier pour lequel l’intervention de l’architecte est obligatoire, en vertu de l’article 4 de la loi de 1939, d’une manière similaire à l’entrepreneur.

Mais qu’y-a-t-il lieu d’entendre par « prestations immatérielles » ? 

Par ces termes, la loi vise essentiellement les professions telles que l’ingénieur en stabilité ou en techniques spéciales ainsi que les bureaux d’étude. Cependant, d’autres professionnels exerçant des prestations de nature immatérielles dans le secteur de la construction tels que le responsable PEB ou le coordinateur sécurité santé sont tous deux exclus de cette définition et ne sont pas obligés de souscrire à une telle une assurance.

En effet, depuis le 1er mai 2015, l’assurance en garantie décennale n’est plus obligatoire pour le responsable PEB, compte tenu de la portée de ses missions, tel que modifié par le décret du 28 novembre 2013. Néanmoins, il peut être conseillé pour le responsable PEB de souscrire à une telle assurance si l’option « à la demande de l’architecte ou du déclarant PEB, il l’assiste dans la conception des mesures » est activée (cf. article 20 §2, 2° du décret du 20 novembre 2013).*

Concernant le coordinateur sécurité santé, l’obligation de souscription à une forme d’assurance en lien avec l’exécution de sa profession est régie par la loi du 9 mai 2019 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile professionnelle dans le secteur de la construction. Dans celle-ci, il est prévu que la responsabilité civile professionnelle de l’architecte, géomètre-expert, coordinateur de sécurité-santé ou autre prestataire du secteur de la construction peut être engagée en raison des prestations intellectuelles qu'il accomplit, à titre professionnel ou des prestations intellectuelles de ses préposés.

* Pour toute information relative à la PEB, consultez le site de la Wallonie (concernant la RC décennale – section C.2.9).

Quelles conditions ?

À titre de conditions substantielles limitatives, la garantie décennale n’est d’application que si : 

  • un contrat d’entreprise est conclu au préalable
  • le vice dont il est question est considéré comme suffisamment grave pour mettre en péril la solidité, la stabilité du bâtiment ou l’étanchéité de l’habitation ainsi que les éléments qui rendent l’habitation étanche au vent et à l’eau 
  • l’action en responsabilité décennale a été intentée dans les dix ans suivant la réception définitive de l’ouvrage
  • et il a été prouvé que le débiteur de la responsabilité décennale concernée a bel et bien commis une faute dans l’exécution du contrat conclu entre les parties.

Par conséquent, une certaine délimitation est apportée quant aux entrepreneurs concernés par cette obligation de souscrire à une assurance en garantie décennale. Il s’agit donc bien uniquement de ceux réalisant le gros œuvre fermé. En effet, outre l’entrepreneur général, c’est-à-dire celui s’engageant à la réalisation de l’ensemble des travaux (qu’ils soient réalisés par ce dernier ou sous-traités totalement ou partiellement), cette obligation concerne également l’entrepreneur chargé des fondations, du gros œuvre, de la structure du toit, des travaux de façade, des menuiseries extérieures, etc.

Suite à cette délimitation, ne sont donc pas considérés comme accomplissant le gros œuvre et soumis à l’obligation : les entrepreneurs qui réalisent les finitions intérieures, les installations sanitaires et de chauffage, les peintres, les poseurs de revêtements de sol, les menuisiers intérieures, etc. Les entrepreneurs de travaux de démolition ne sont pas non plus soumis à cette obligation d’assurance.

Particularité pour les projets en auto-construction

En ce qui concerne les projets en auto-construction, la définition légale du titre d’entrepreneur exige que ce dernier effectue les travaux en question pour le compte d’une autre personne (publique ou privée) et moyennant une rémunération directe ou indirecte. 
Suivant ces termes, un maître d’œuvre qui effectue des travaux pour son propre compte ne peut être considéré comme soumis à une obligation de souscrire à une assurance en garantie décennale au sens de la loi Peeters.

Néanmoins, le maître d’œuvre auto-entrepreneur sera tout de même soumis aux règles normales afférentes à sa position dans l’ouvrage en question, à savoir l’obligation de faire appel aux professionnels pertinents (tels que l’architecte comme détaillé ci-dessus) ou encore d’obtenir le permis d’urbanisme, à défaut de quoi des poursuites pénales pourraient être envisagées.

Et dans le cadre des marchés publics ?

Le CCTB rappelle au titre « A4.2 Assurances » que l’entrepreneur doit légalement contracter une assurance responsabilité civile décennale et veiller à ce que ses éventuels sous-traitants satisfassent également à cette obligation.

Par le simple fait de rendre le CCTB applicable au marché au travers du cahier spécial des charges, cette disposition du A4.2 est également d'application.


Encore une question ?

Le service des facilitateurs de l'UWA est un projet mené avec le soutien et à l’initiative de la Wallonie.

Pour toute question complémentaire, n'hésitez pas à nous contacter à l'adresse facilitateurs@uwa.be

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