Se loger décemment, un droit bientôt inaccessible ?

En 4 ans, les Wallons ont perdu 50% de leur pouvoir d’achat immobilier. En 2 ans, la construction et la rénovation d’un bien sont devenues 25% plus chères. Les loyers s’envolent également. Face aux prémices d’une crise du logement, les acteurs de l’immobilier s’unissent pour tirer la sonnette d’alarme. Redéfinition des charges d’urbanisme, soutien à l’isolation extérieure des bâtiments, modulation de la fiscalité immobilière, mise en place d’une approche progressive et réaliste intégrant les enjeux climatiques. Ils appellent les autorités wallonnes à prendre des mesures adaptées pour soutenir les citoyens dans ce qui constitue la dépense la plus importante des ménages.

Les acteurs de l’immobilier, Embuild (ex-Confédération Construction), Federia (Fédération des agents immobiliers francophones), le Conseil francophone de Fednot (Fédération du notariat), UPSI (Union Professionnelle du Secteur Immobilier) et UWA (Union Wallonne des Architectes), soutenus par l’Institut pour un Développement Durable, le Centre d’Etudes en Habitat Durable et UCM, s’unissent pour interpeller les autorités wallonnes. Dans un Mémorandum envoyé ce 31 août à l’ensemble des Ministres wallons, ils demandent la mise en place, sans tarder, de mesures concrètes pour enrayer une crise du logement sans précédent, et ce, en concertation avec le secteur de l’immobilier.

Car se loger est un droit. Le droit à un logement décent est d’ailleurs reconnu à l’article 23 de la Constitution qui garantit à l’ensemble des citoyens le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. Si la rénovation et l’amélioration de la performance énergétique du parc résidentiel constituent un défi majeur, l’accès à un logement décent et durable l’est tout autant.

Or, en 2 ans seulement, les coûts de construction et de rénovation ont enregistré une hausse de 25%, soit une augmentation similaire à celle enregistrée précédemment sur une période de 11 ans (2008 - 2019). Face à cette hausse des prix liés au logement et à l’inflation, les Wallons ont perdu 50% de leur pouvoir d’achat immobilier depuis 2019.

C’est pourquoi les acteurs de l’immobilier préconisent une nouvelle vision de la politique du logement poursuivant deux objectifs majeurs : garantir à tous les citoyens l’accessibilité au logement et soutenir la transition énergétique.

Des recommandations concrètes et réalistes sont exprimées, dans un juste équilibre entre les besoins liés à la transition énergétique et les réalités financières et sociales des citoyens wallons.

1) Garantir le droit à un logement décent, durable et accessible


→ En matière de logement (privé-public) :
1. Développer des partenariats public-privé pour renforcer l’offre de logements de qualité à un coût abordable et prévoir une concertation en amont avec les acteurs, pour notamment analyser la faisabilité du projet. 
2. Stimuler le secteur privé à investir dans la création et la rénovation de logements. 
3. Dans le cadre de la construction de logements publics, garantir une mixité économique et sociale pour éviter le phénomène de ghettoïsation.

→ En matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire : 
1. Repenser en profondeur les charges d’urbanisme pour réduire le coût des constructions et éviter leurs effets centrifuges (tendance à construire en dehors des centralités). 
2. Améliorer le cadre de vie dans les centres urbains et ruraux et disposer de visions et de cadres urbanistiques intégrés sur le long terme. 

2) Soutenir l’amélioration énergétique des bâtiments


1. Mettre en œuvre de manière progressive et par étapes les mesures d’amélioration de la performance énergétique des bâtiments. 
2. Mettre à la disposition des propriétaires les financements nécessaires pour faire face aux coûts des travaux. 
3. Adresser ces mesures aux logements occupés par leurs propriétaires, mais aussi aux logements mis en location. 
4. Modifier les règles relatives à la PEB pour garantir leur soutenabilité. 
5. Mettre en place une méthode de calcul de la PEB qui repose sur un socle commun entre les trois Régions. 

Les outils mobilisables pour atteindre ces objectifs sont notamment :

  • La fiscalité et la mise en place de moyens de financement innovants 

1. Développer des incitants fiscaux, par exemple sous la forme d’une réduction des droits d’enregistrement conditionnée à une rénovation énergétique – comme l’ont initié la Région flamande et la Région de Bruxelles-Capitale – ou de la TVA (l’achat d’un bien neuf – respectant les exigences en matière de PEB – est aujourd’hui soumis à la TVA au taux de 21%). 
2. Accorder une réduction temporaire du précompte immobilier en cas de rénovation énergétique par le propriétaire du bien ou encore pour les logements neufs et les démolitions-reconstructions. 
3. Proposer une stratégie de financement permettant d’accompagner la stratégie de rénovation à long terme du bâti wallon afin de mobiliser de manière conséquente les moyens privés complémentairement aux moyens publics.

  • La gouvernance

1. Remettre le logement au cœur des politiques wallonnes, avec une vision transversale et un cadre juridique prévisible, stable et accompagné de mesures transitoires. 
2. Encourager la mutualisation des services communaux. 
3. Inciter les communes à se doter de leurs propres schémas de développement communaux ou pluricommunaux complémentaires au SDT régional. 
L’ensemble du secteur immobilier en appelle à la progressivité des mesures ayant un impact sur les coûts des travaux (construction et rénovation) et invite les autorités à la concertation afin d’assurer une vision globale et transversale des défis de la transition énergétique.

Fabrizio Tengattini, Président de l’UWA : « La hausse des prix des matériaux de construction et des prêts hypothécaires provoque le ralentissement de la commande publique, des grandes promotions immobilières et freinent bien entendu l’accès au logement pour le particulier. Nous sommes prêts à travailler avec les autorités et à trouver des solutions tous ensemble. »

Mémorandum 


Pour lire le mémorandum complet : Accès au logement-Mémorandum

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